Comment l'industrie américaine devient plus compétitive au détriment de la France et de l'Europe ?
Il y a trois mois, le rapport Draghi mettait en lumière les défauts structurels de l'Europe par rapport aux États-Unis. Une étude réalisée par McKinsey, Trendeo et l'institut de la réindustrialisation confirme aujourd'hui le retard pris par le Vieux Continent. Cependant, il reste de l'espoir.
Si l'Europe ne parvient pas à améliorer sa productivité, des choix difficiles devront être faits. Il sera difficile de rester à la pointe des nouvelles technologies, de promouvoir la responsabilité climatique et d'être un acteur majeur sur la scène mondiale. Le financement de notre modèle social pourrait être compromis, ce qui nous obligerait à revoir nos ambitions à la baisse, voire à les abandonner. C'est un défi crucial pour l'Europe. Selon un rapport publié en septembre par Mario Draghi, le revenu disponible par habitant a augmenté presque deux fois plus aux Etats-Unis qu'en Europe depuis 2000, soulignant ainsi les faiblesses structurelles du Vieux Continent par rapport à l'Amérique. Une étude menée par McKinsey, Trendeo et l'Institut de la Réindustrialisation confirme cette tendance de décrochage européen.
Cette année, les États-Unis ont été la principale destination des Investissements directs étrangers (IDE). En 2020, l'Union européenne et l'Amérique ont reçu respectivement 10 % et 12 % des investissements industriels mondiaux. Quatre ans plus tard, ces chiffres ont grimpé à 12 % pour l'UE et 29 % pour les États-Unis. De plus, la productivité a augmenté de 1,8 % par an aux États-Unis depuis 2016, tandis qu'elle n'a augmenté que de 0,7 % dans l'UE, et est restée à zéro en France.
En proposant des réglementations favorables et des incitations fiscales généreuses pour les investissements, telles que l'Inflation Reduction Act (IRA), l'administration Biden a rendu les Etats-Unis attractifs. Les entreprises européennes ont saisi l'opportunité. Pour la première fois, leurs investissements aux États-Unis dépassent ceux réalisés en Europe.
De l'autre côté de l'océan Atlantique, tout semble plus simple. Les règlements sont moins stricts et les coûts de l'énergie sont plus abordables. Au cours des dix dernières années, les États-Unis sont devenus un grand acteur dans le domaine des hydrocarbures grâce au gaz et au pétrole de schiste. Leur sous-sol riche en ressources et leur solide réseau d'infrastructures leur permettent de bénéficier d'une électricité bon marché, bien moins chère que dans des pays comme l'Allemagne. Selon Matthieu Dussud, directeur associé de McKinsey France, les coûts de l'énergie sont un sujet majeur à ne pas négliger.
Sel avantage concurrentiel devrait continuer avec Donald Trump. David Cousquer, fondateur et directeur général de Trendeo, prévoit que l'importance des critères environnementaux dans les investissements pourrait diminuer, mais que le niveau des aides restera élevé.
De 2016 à 2024, l'Europe a reçu 30 % des investissements en recherche et développement, soit 44 milliards de dollars, tandis que l'Amérique en a reçu 24 %, soit 35,4 milliards de dollars. Cette différence est particulièrement marquée dans les technologies innovantes telles que l'automatisation, la connectivité et l'intelligence artificielle. En ce qui concerne l'intelligence artificielle, les États-Unis ont reçu 32 % des investissements, alors que l'Europe n'en a reçu que 20 %. En ce qui concerne les data centers, les États-Unis sont le premier pays à la fois en termes d'investissements (74 %) et de destination (67 %).
Selon un classement, les États-Unis sont en première position dans le domaine de l'industrie du futur, en se basant sur divers critères tels que la flexibilité, les technologies numériques, l'efficacité énergétique, l'impact environnemental et la responsabilité sociale. L'Europe est en retard mais a la possibilité de combler son retard selon Matthieu Dussud. Elle dispose de leviers dans les technologies de demain qu'elle peut commencer à utiliser dès maintenant.
La France se distingue par sa maîtrise des technologies quantiques, qui offrent des possibilités d'amélioration de la productivité, selon Matthieu Dussud. Cependant, malgré les efforts pour promouvoir la réindustrialisation, lancés par Emmanuel Macron depuis plusieurs années, celle-ci tarde à se concrétiser.
Après une période de croissance entre 2021 et 2023, on constate cette année une baisse de 10 % dans le volume des projets d'investissements annoncés, une première en cinq ans. Les secteurs manufacturiers tels que la pharmacie et la métallurgie sont particulièrement touchés. En 2024, le solde net d'ouverture d'usines en France sera négatif (-15), une situation inédite après neuf années consécutives de solde positif.
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