Les défis de l’e-prescription médicale pour l’entreprise et la santé : entre incompatibilité des logiciels et déploiement hétérogène

Obstacles Société Bien-être

La prescription médicale électronique présente des lacunes qui la rendent vulnérable à la fraude.

Est-ce que le gouvernement a fixé des objectifs trop ambitieux en prévoyant la généralisation de l'e-prescription d'ici fin 2024, malgré les problèmes d'incompatibilité des logiciels et de déploiement hétérogène ?

Selon la Délégation ministérielle au numérique en santé, environ 9 000 médecins ont eu recours au moins une fois au téléservice de l'Ordonnance Numérique.

Les fraudes sont très répandues dans le domaine de l'Assurance maladie. En 2022, elles ont causé un préjudice estimé à 3,4 milliards d'euros, y compris les erreurs professionnelles, selon la Cour des comptes. Cependant, la France a trouvé une solution depuis longtemps : une ordonnance électronique partagée entre les professionnels de la santé via un serveur sécurisé auquel le patient lui-même n'a pas accès. Il est donc difficile de réutiliser cette ordonnance à volonté sans consulter à nouveau le médecin, et de l'exploiter à des fins lucratives – certains "réseaux", qui sont difficiles à démanteler, revendent en effet ces médicaments à l'étranger pour des milliers d'euros.

Afin de détecter les personnes qui commettent des fraudes, la Sécurité sociale investit massivement dans l'intelligence artificielle et les enquêteurs spécialisés dans la cybercriminalité.

La e-prescription, qui est un élément clé du "Ségur du numérique en santé", n'a pas encore été largement adoptée en France. Initialement prévue pour 2020, puis reportée à 2022, sa mise en place a encore été repoussée et ne devrait finalement être généralisée qu'à la fin de l'année 2024. Cependant, la dématérialisation de la santé en France progresse. Selon Jean-Baptiste Milone, responsable ministériel du numérique en santé, au cours du mois d'août 2023, 1,7 million d'ordonnances ont été placées dans Mon espace santé, ce qui montre une augmentation régulière. Il est important de noter que ces ordonnances médicales partagées en ligne ne doivent pas être confondues avec la e-prescription, qui est exclusivement visible par les médecins et les pharmaciens.

Envisage-t-on un nouveau report ?

Dans le cadre du plan Ségur de la Santé, 100 millions d'euros sont prévus dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 afin de combler le retard numérique. Malgré l'aide gouvernementale pour financer l'installation ou la mise à jour du logiciel en question, tous les professionnels concernés ne semblent pas prêts à prendre position. Selon un rapport de la Cour des comptes, seuls 259 médecins et 76 pharmacies utilisaient ce service en septembre 2022. De son côté, la Délégation ministérielle au numérique en santé estime qu'environ 9 000 médecins l'ont déjà fait au moins une fois et vise l'objectif que 40 000 d'entre eux aient franchi le pas d'ici la fin de l'année prochaine. Cependant, cela reste une petite victoire étant donné le milliard de prescriptions médicales effectuées chaque année.

L'installation prend du temps et le processus est coûteux à long terme. Stéphane Oustric, qui est à la fois président du conseil départemental de l'Ordre national des médecins et médecin généraliste en maison de santé, affirme que l'achat d'un seul logiciel coûte 2000 euros par an. Pour l'ensemble de son établissement, cela représente 20 000 euros, auxquels s'ajoutent des frais mensuels d'environ 200 euros pour des services en ligne tels que Maiia et Dotcolib. Ces coûts peuvent être difficiles à supporter pour certains professionnels indépendants, qui sont les premiers à expérimenter la transition numérique.

La e-prescription a du mal à se développer en raison d'un manque de compatibilité entre les logiciels utilisés par les différents professionnels de santé, explique Pierre-Olivier Variot, président de l'Union des Syndicats des Pharmaciens d'Officine (USPO). Les logiciels utilisés par les pharmaciens et les médecins ne sont pas bien adaptés pour communiquer entre eux, déplore-t-il.

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De plus, il y a actuellement peu de professionnels qui peuvent réellement utiliser cette technologie, ce qui limite son efficacité dans la lutte contre la fraude. "Le déploiement dans les hôpitaux est plus difficile car la prescription hospitalière présente des spécificités qui nécessitent des modifications importantes des logiciels. Par conséquent, la mise en place de cette technologie a principalement été axée sur les médecins de ville et les pharmacies", explique Jean-Baptiste Milone. La prochaine étape consistera à réaliser des tests dans les EHPAD pour les sage-femmes et les infirmières. "Cependant, tant que nous négligeons ces professionnels, il est peu probable que le dispositif soit pleinement efficace", met en garde Stéphane Oustric. La numérisation de l'ordonnance nécessite donc une collaboration d'équipe.

Pour le moment, il n'est pas envisageable d'interdire complètement les ordonnances en papier. Cependant, les nouvelles prescriptions créées dans le logiciel de l'Ordonnance Numérique seront toutes dotées d'un QR code. Ce code permettra aux pharmaciens de vérifier l'authenticité de l'ordonnance et de savoir si des médicaments ont déjà été délivrés sur la base de ce document, que ce soit en version numérisée ou imprimée. C'est ce qu'explique Jean-Baptiste Milone.

Santé et soins médicaux

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