Difficultés Société Protection
Est-ce que l'armée allemande a le potentiel de devenir la meilleure d'Europe ?
Deux chercheurs de l'IFRI ont récemment publié un rapport dans lequel ils examinent les avantages et les inconvénients de la Bundeswehr. Malgré le Zeitenvende (changement d'ère) et le fonds spécial de 100 milliards d'euros, la modernisation de l'armée allemande s'annonce comme un défi colossal.
Un tank Leopard 2 stationné sur une base militaire en Allemagne à Munster.
La déclaration a suscité l'intérêt de la communauté militaire européenne. En mai 2022, trois mois après l'annonce de la création d'un fonds spécial de 100 milliards d'euros pour moderniser la Bundeswehr, le chancelier allemand Olaf Scholz a clairement déclaré son objectif pour les forces armées allemandes. "Dans un proche avenir, l'Allemagne aura la plus grande armée conventionnelle d'Europe", a-t-il assuré. Quelques semaines plus tard, le chancelier a précisé que Berlin dépenserait entre 70 et 80 milliards d'euros par an pour la défense, ce qui ferait de l'Allemagne le pays ayant le budget le plus important en Europe (47 milliards d'euros en 2024 pour la France, 59,8 milliards pour le Royaume-Uni).
Peut-on atteindre l'objectif ? Une étude réalisée par le think tank IFRI et publiée le vendredi 29 septembre évalue les capacités de la Bundeswehr suite au "Zeitenwende" (le changement d'ère lié à l'invasion russe de l'Ukraine). Le constat est clair : bien que des ressources massives soient disponibles, l'Allemagne est confrontée à une série d'obstacles pour transformer ses forces armées en un outil réellement efficace.
La première difficulté est le manque de personnel. En raison du manque de personnes intéressées, Berlin souffre d'une pénurie de soldats.
La déclaration a suscité l'intérêt de la communauté militaire européenne. En mai 2022, trois mois après l'annonce de la création d'un fonds spécial de 100 milliards d'euros pour moderniser la Bundeswehr, le chancelier allemand Olaf Scholz a clairement exprimé son objectif pour les forces armées allemandes. Il a affirmé que "bientôt, l'Allemagne aura la plus grande armée conventionnelle d'Europe". Quelques semaines plus tard, le chancelier a précisé que Berlin dépenserait entre 70 et 80 milliards d'euros par an pour la défense, ce qui ferait de l'Allemagne le pays avec le plus gros budget en Europe (47 milliards d'euros en 2024 pour la France, 59,8 milliards pour le Royaume-Uni).
Est-ce que l'objectif est réalisable ? Une étude réalisée par le think tank IFRI, publiée le vendredi 29 septembre, fait un premier bilan du "Zeitenwende" (le changement d'ère causé par l'invasion russe de l'Ukraine) sur les capacités de l'armée allemande. La conclusion est claire : bien que des ressources massives soient disponibles, l'Allemagne doit encore surmonter plusieurs obstacles pour transformer réellement ses forces armées en un outil efficace.
Manque flagrant de personnel militaire
Le premier obstacle auquel est confronté le ministère de la Défense de Berlin est le manque de personnel. En raison d'un manque de vocations, il y a une pénurie de soldats, ce qui empêche le ministère d'atteindre son objectif de 203 000 militaires, alors qu'il en compte actuellement environ 180 800. Malgré les fonds alloués pour la création de 20 000 postes supplémentaires, la Bundeswehr a du mal à recruter et à fidéliser ses soldats, selon les auteurs de l'étude, Elie Tenenbaum et Léo Péria-Peigné. Les causes de cette situation sont nombreuses : une démographie en déclin, un marché du travail concurrentiel et une attractivité limitée des carrières militaires, malgré un salaire de base supérieur d'un tiers à celui des soldats français.
Le deuxième défi est la situation actuelle de l'armée allemande, qui est décrite comme étant "à court de ressources" dans le rapport. En raison de l'austérité devenue une "culture d'entreprise", de nombreuses bases et infrastructures de stockage et de maintenance ont été fermées, ce qui a conduit à l'utilisation de matériels mal entretenus par la Bundeswehr. Les taux de disponibilité de ces matériels sont très bas (moins de 50% en 2018 pour les blindés Puma, et seulement 20 à 22% pour les hélicoptères Tigre et NH90). De plus, l'armée est également handicapée par la lenteur et la bureaucratie excessive de sa structure d'achats, équivalente à la DGA française, la Bundesamt für Ausrüstung, Informationstechnik und Nutzung der Bundeswehr (BAAINBw).
Le troisième obstacle est d'ordre financier. Selon Elie Tenenbaum et Léo Péria-Peigné, les 100 milliards d'euros alloués représentent un effort considérable, mais cette somme reste inférieure de moitié, voire des deux tiers, aux besoins estimés par la coalition d'ici 2022. En somme, grâce à un apport de 19,2 milliards d'euros prévu, le fonds spécial permet à Berlin d'atteindre l'objectif de consacrer 2% de son PIB à la défense d'ici 2024. Cependant, ce rythme ne pourra être maintenu que jusqu'en 2027. Par la suite, le budget annuel risque de se stabiliser autour de 57,4 milliards d'euros, alors qu'il faudrait encore 13 à 17 milliards de plus pour rester aux 2% du PIB.
La réalisation des objectifs des trois armées allemandes risque d'être compliquée en raison de ces obstacles. Le renforcement des trois divisions de l'armée de terre (Heer) est entravé par une pénurie de personnel. L'armée de l'air devra investir massivement pour exploiter sa flotte de F-35, tout en conservant des ressources pour le futur SCAF, un projet franco-germano-espagnol de nouvel avion de combat et de drones d'appui, prévu pour 2040-2045. Quant à la marine, elle souhaite équiper un tiers de sa flotte de drones d'ici 2035 et augmenter sa puissance en mer Baltique. Cependant, ce programme est ambitieux, car en février 2022, 50% de la flotte allemande était incapable de prendre la mer.
Pays: Allemagne Force militaire: Armée française
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