Le Congo Brazzaville entre au capital de Corsair : quelles conséquences pour l’entreprise et les transports ?

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Les raisons cachées derrière l'intervention soudaine du Congo Brazzaville pour venir en aide à Corsair

Par Claire Bouleau le 19.12.2023 à 19h36, mis à jour le 20.12.2023 à 10h05 Écouter pendant 5 minutes Abonnés

En exclusivité, Challenges a eu l'opportunité de discuter avec les responsables congolais afin de comprendre leur motivation à investir dans Corsair. Cette compagnie, qui opère principalement dans les départements d'outre-mer et qui connaît des difficultés, prévoit de réaliser une levée de fonds où le petit pays africain contribuerait à hauteur de 15 millions d'euros en échange d'une participation minoritaire.

Malgré sa petite taille et sa faible population, le Congo Brazzaville se présente comme le sauveur inattendu de la compagnie aérienne Corsair. En effet, alors que cette dernière connaît des difficultés financières et cherche activement des fonds depuis plusieurs mois, nos collègues du Monde ont révélé qu'elle prépare un tour de table. Il s'agira du deuxième tour de financement en peu de temps, après sa recapitalisation de 2020 qui avait bénéficié d'un plan de financement de 300 millions d'euros avec une participation importante de l'État. Ce qui est surprenant, c'est que cette fois-ci, un actionnaire inattendu entre en jeu : le petit pays d'Afrique centrale également connu sous le nom de République du Congo.

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En substance, Corsair a l'intention de lever 15 millions d'euros auprès de certains de ses actionnaires actuels (certains d'entre eux ayant décidé de se retirer), de particuliers antillais et, nouveauté, du conseil départemental de la Guadeloupe. De plus, Corsair prévoit de lever 15 autres millions d'euros auprès du Congo Brazzaville, ce qui lui permettrait d'obtenir entre 30 et 40 % du capital. À cette occasion, l'OMRP, qui regroupe tous les actionnaires de Corsair, devrait changer de nom. Selon Le Monde, cet apport d'argent frais permet désormais à la compagnie de négocier une aide de l'État et du Ciri (Comité Interministériel de Restructuration Industrielle) pour effacer ses dettes sociales et fiscales.

Depuis 2012, Corsair, une compagnie spécialisée dans les vols vers les territoires d'outre-mer, s'est concentrée sur les Antilles. Cependant, récemment, elle s'est retrouvée à envisager d'accueillir un État africain dans son capital. La raison en est simple : elle cherche des fonds frais et a vu une opportunité en Afrique. En effet, Corsair est présente sur le continent depuis 2012, d'abord avec une ligne à Dakar (Sénégal), qui a été fermée, puis avec des lignes vers Abidjan (Côte d'Ivoire), avec au moins sept vols par semaine, ainsi que Cotonou (Bénin) et Bamako (Mali), avec chacun quatre vols par semaine. La compagnie s'est rapidement rendu compte que certains pays africains avaient un potentiel de trafic aérien important, tels que le Cameroun, le Gabon, la République démocratique du Congo et le Congo Brazzaville.

Au début, les discussions avec les autorités congolaises ont uniquement porté sur l'ouverture d'une nouvelle route aérienne entre Paris et Brazzaville, la capitale du Congo. Le PDG de Corsair, Pascal de Izaguirre, s'est rencontré avec le président congolais Denis Sassou-Nguesso. Les autorités congolaises expliquent que le Congo cherchait des partenaires pour développer les vols vers la France, car actuellement, Air France est la seule compagnie à proposer des vols directs. En tant que seule compagnie sur cette route depuis 1946, Air France affiche des tarifs très élevés pour de nombreux passagers, ce qui limite le potentiel touristique du Congo. Les autorités locales déplorent que les touristes ne connaissent pas bien la forêt tropicale et les grands parcs animaliers du pays, qui sont actuellement réservés à une élite fortunée. Elles insistent sur la nécessité d'une meilleure connexion aérienne avec l'Europe.

Le Congo a souhaité aller plus loin en concluant un accord capitalistique afin de faciliter le désenclavement de son pays. Cet accord ne se limite pas seulement à l'ouverture d'une ligne, il prévoit également une aide de Corsair pour relancer sa compagnie nationale, ECAir, qui est actuellement en difficulté. Cette aide prendra la forme d'une assistance technique et de partage de compétences. L'objectif est de faire d'ECAir le prolongement de Corsair, avec Corsair se concentrant sur les liaisons avec l'Europe et ECAir sur les vols domestiques et les liaisons avec les pays voisins tels que la RDC, le Bénin et l'Angola. Le but ultime est de faire de Brazzaville un hub en attirant les passagers de ces pays pour ensuite les amener en Europe.

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De plus, selon une source locale, Corsair possède des sociétés hôtelières dans son portefeuille, ce qui lui permettrait de promouvoir les avantages du Congo. La source mentionne en particulier le projet de développer le tourisme basé sur la mémoire à Pointe-Noire, qui était un site clé de la traite négrière, en particulier dans l'ancien port d'embarquement des esclaves de Loango.

Actuellement, le accord n'est pas finalisé. Il est encore soumis à l'approbation de l'Élysée et de Bruxelles, avec qui les négociations se poursuivent. Est-ce que la République du Congo, conseillée par le cabinet d'avocats Franklin, et Corsair, qui travaille avec la banque Lazard, réussiront à convaincre ces parties ? Une chose est certaine : en attendant, les opposants, les créanciers et les loueurs d'avions, préparent également leurs arguments. Ils soulignent en particulier le fait que Corsair ne serait pas autorisé à recevoir une nouvelle aide pendant dix ans après celle de 2020. Ils posent également une question d'ordre moral : "Est-ce que l'État peut accorder plusieurs dizaines de millions d'euros au profit du Congo ?" La réponse sera donnée bientôt.

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