Jeune Afrique : la mutation vers le numérique et le panafricanisme en marche

Le magazine panafricain Jeune Afrique commence à se moderniser en se concentrant sur sa stratégie numérique et son contenu professionnel. Grâce aux profits générés par ses événements commerciaux, le groupe de presse Jeune Afrique accélère sa transition vers le numérique et s'ouvre au marché anglophone en Afrique.

Patrick Pouyanné, qui est le PDG de TotalEnergies, discutait avec Aliko Dangote, qui est l'homme le plus riche d'Afrique. Cette rencontre était l'un des moments forts parmi de nombreux autres organisés en mai dernier lors de l'Africa CEO Forum à Kigali, au Rwanda. En provenance de 73 pays, 2 000 entrepreneurs, cadres du secteur privé et public, ainsi que des politiciens, avaient payé un billet à 2 500 euros pour réseauter et assister à des conférences. Cet événement d'affaires majeur sur le continent était organisé par Jeune Afrique, un média panafricain fondé à Paris en 1960 par le journaliste tunisien Béchir Ben Yahmed. Et ce n'est pas le seul événement qu'ils organisent ! La quatrième édition de l'Africa Financial Summit s'est récemment tenue les 9 et 10 décembre à Casablanca, au Maroc, réunissant les dirigeants des banques du continent.

Amir Ben Yahmed, le fils du fondateur et actuel dirigeant avec son frère Marwane depuis 2021, exprime le désir d'accompagner le développement de l'industrie financière en Afrique. Le secteur des événements représente déjà 40 % du chiffre d'affaires du groupe Jeune Afrique Media, qui s'élevait à 28 millions d'euros l'année précédente. Un ancien cadre du groupe souligne le succès de l'entreprise, attribué à sa connaissance approfondie des écosystèmes africains.

Une baisse constante de l'audience a impacté les revenus de Jeune Afrique, obligeant le magazine à se tourner vers l'événementiel pour maintenir ses finances et soutenir sa transition vers le numérique. Malgré son passé prestigieux et ses collaborations avec des personnalités renommées, la crise sanitaire a provoqué une diminution significative de son lectorat en 2020. En réponse, Jeune Afrique a opté pour un format mensuel en 2021, mettant l'accent sur son site web et son application payants.

Les anciennes méthodes du magazine, telles que les classements des grandes entreprises, des banques et des villes attractives, sont toujours utilisées mais l'accent est désormais mis sur l'augmentation du nombre d'abonnés numériques, qui est actuellement de 30 000 comparé aux 40 000 exemplaires papier en circulation. Pour attirer les internautes, une offre de trois articles gratuits via WhatsApp a rencontré un succès retentissant, avec plus de 3 millions d'abonnés. De plus, une nouvelle version du site, axée sur la politique et l'économie, sera lancée le 18 décembre.

Le groupe se concentre également sur le secteur lucratif de l'information professionnelle, rivalisant avec le pionnier Africa Intelligence (anciennement Lettre du Continent, acquis par le groupe Indigo), grâce à sa lettre Africa Business + (à partir de 1 350 euros par an). De plus, une base de données payante sur les fusions-acquisitions en Afrique sera bientôt mise en ligne.

Jeune Afrique continue de se développer en dehors de l'Afrique de l'Ouest, où il est historiquement établi. The Africa Report, sa version anglophone, a embauché des représentants au Nigeria, au Ghana et en Afrique du Sud. Dans le but de renforcer leur présence panafricaine, les frères Ben Yahmed envisagent d'intégrer des actionnaires privés issus des différentes régions du continent.

Une levée de fonds de 16 millions d'euros est en cours, mais les détails restent confidentiels. Les dirigeants de Jeune Afrique gardent le secret sur les actionnaires du groupe. Sous la direction d'Amir Ben Yahmed, qui perpétue le style de gestion strict de l'entreprise, l'héritage de son père, un homme de presse, est valorisé financièrement. L'objectif est de faire de Jeune Afrique un acteur majeur dans la transformation du continent.

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