Défis dans le monde des affaires
Jean-Pierre Mustier est une personne qui occupe le poste de président d'Atos. On ne sait pas grand-chose de lui, mais il est intéressant de le découvrir. Cet article a été écrit par Esther Attias et Grégoire Pinson le 18 octobre 2023 à 14h30 et il faut environ 6 minutes pour le lire.
Le célèbre ancien banquier de la Société générale, âgé de 62 ans, a été choisi pour devenir le président non exécutif d'Atos, une entreprise informatique en déclin.
En 2017, Jean-Pierre Mustier occupait le poste de PDG de la banque italienne Unicredit.
Jean-Pierre Mustier, ancien banquier renommé de la Société générale, a été choisi pour devenir le président non exécutif d'Atos, une entreprise informatique en difficulté. Il prendra la place de Bertrand Meunier, critiqué pour sa gestion. Mustier est souvent considéré comme un homme providentiel dans le monde des affaires, ayant déjà été appelé à la rescousse pour des entreprises en difficulté telles que EDF et la Banque postale.
Sa mission consistera à regagner la confiance des actionnaires qui s'opposent vivement à la vente de l'entité interne Tech Foundations à l'homme d'affaires tchèque Daniel Kretinsky. Cependant, cela n'aura aucune influence sur la stratégie en cours : la vente de la branche infogérance est simplement reportée au début du deuxième trimestre 2024. Certains se demandent déjà : que faut-il comprendre lorsque la direction d'un grand groupe industriel est confiée à un financier ?
Article:
Atos, une entreprise technologique française, fait face à une crise interne. Bertrand Meunier, le directeur de l'entreprise, est décrit
Il y a deux aspects importants à prendre en compte : d'un côté, la situation très préoccupante de cette entreprise autrefois prospère de l'industrie française, qui est confrontée à des problèmes de gouvernance et de stratégie depuis plusieurs années. D'un autre côté, il est impressionnant de constater à quel point les hauts dirigeants français sont capables de se réinventer et de trouver de nouvelles opportunités.
Ancien exclu
Jean-Pierre Mustier, ancien directeur de la banque de financement de la Société générale de 2003 à 2008, a déjà été écarté une première fois des postes de direction. Considéré comme un bouc émissaire par certains et comme le responsable direct par d'autres, il supervisait de loin la division où travaillait un jeune prodige de la finance du nom de Jérôme Kerviel. En quelques clics, le trader de 26 ans a causé une perte de près de 4,9 milliards d'euros à la banque rouge et noire, la plongeant dans une crise dont elle a du mal à se remettre. Mustier, passionné de mathématiques et obsédé par les chiffres, avait jusqu'à présent réussi à enrichir la banque en développant des produits financiers complexes, ce qui lui avait permis de maintenir son dynamisme, sa réputation et son indépendance, alors que sa taille réduite en faisait une cible tentante, notamment pour BNP Paribas.
Dans son livre Journal intime d'un banquier (publié par Les Arènes), Hugues Le Bret, ancien directeur de la communication de la banque rouge et noire, raconte l'affaire Kerviel de l'intérieur. Il décrit Jean-Pierre Mustier, le directeur général de la banque, comme ayant un visage vieilli par les nuits sans sommeil, mais restant solide durant la crise. En tant que supérieur hiérarchique de Jérôme Kerviel, Le Bret mène lui-même les premiers interrogatoires avec le trader. Il se retrouve également en première ligne pour résoudre les positions risquées du groupe, milliard par milliard, tout en cherchant à retarder le moment où il faudra avertir les autorités.
Considéré comme le successeur de l'ancien PDG, Daniel Bouton, en opposition à Frédéric Oudéa, il est maintenant rejeté par la société. Un an plus tard, lorsque le monde est plongé dans la crise des subprimes, Mustier est reconnu coupable d'abus d'information privilégiée pendant cette même crise. Il décide alors de démissionner. Quelques mois plus tard, il sera innocenté en appel.
Après avoir pris sa retraite pendant deux ans loin du monde des affaires, il décide de rejoindre Unicredit, la principale banque italienne, en 2011. Pendant son temps là-bas, il s'est fait connaître pour son approche directe et sa capacité à redresser des entreprises en difficulté, ce qui correspond parfaitement aux besoins d'Atos.
Dans son curriculum vitae, il peut mettre en avant ses accomplissements remarquables au sein de la banque italienne, tels que sa réussite à lever 13 milliards d'euros lors d'une tournée internationale et la réduction significative du groupe grâce à la vente de filiales et d'activités pour un montant de 50 milliards d'euros, ainsi que la suppression de près de 1 400 emplois. Il a quitté l'entreprise une première fois, puis une deuxième fois en 2020, suite à un désaccord critique avec le gouvernement italien qui l'a contraint à racheter la société financière italienne Monte Paschi di Siena, qui était rongée par les dettes et les actifs toxiques.
Les Italiens ont fait l'expérience de la résistance face à un pouvoir extérieur et de la dureté, ce qui leur a été bénéfique lorsque la banque a été redressée, mais aussi préjudiciable lorsque l'homme a quitté Unicredit, entraînant une baisse du cours de Bourse. Cet homme, réputé pour être un "control freak", est extrêmement exigeant, envers lui-même et envers les autres. Un de ses amis se souvient d'un déjeuner avec Mustier, où ce dernier se souciait non seulement de son équilibre alimentaire, mais aussi de celui de son ami, allant jusqu'à dire : "Tu ne veux pas de ce pain, n'est-ce pas? Tu ne vas pas en manger, n'est-ce pas ?"
L'exigence est une caractéristique constante de la personnalité de Jean-Pierre Mustier. Selon Pierre-Yves Chabert, avocat d'affaires chez Cleary Gottlieb, qui le connaît depuis leur enfance et leurs années au lycée Blaise-Pascal à Clermont-Ferrand, Jean-Pierre est profondément influencé par une éthique typiquement auvergnate. Il s'impose une discipline totale et cherche constamment à se dépasser. Jean-François Palus, PDG de Gucci, qui a travaillé avec Mustier sur des épreuves de mathématiques à "Ginette", l'établissement Sainte Geneviève à Versailles, confirme que Jean-Pierre visait l'excellence dans tous les domaines, que ce soit en mathématiques, en sciences ou en français. Cette philosophie, Mustier l'applique à tous les aspects de sa vie, y compris à ses hobbies. Sa volonté de relever des défis a nourri sa passion pour le parachutisme, qu'il a également partagée avec Michel Paulin, son camarade de promotion à l'École Polytechnique et actuel directeur général d'OVH.
Après avoir démissionné de la Société générale, Jean-Pierre Mustier, qui est naturellement réservé, a renforcé sa façade de moine soldat avec encore plus de détermination. Chabert souligne qu'il a été critiqué pour sa moralité personnelle.
Après avoir été prudent avec ses investissements chez Unicredit, l'investisseur se rapproche maintenant du fonds Tikehau, avec lequel il a une relation étroite depuis ses débuts. Avec ses amis fondateurs Mathieu Chabran, Antoine Flamarion, et Bernard Arnault (le patron de LVMH et actionnaire de Challenges) parmi les investisseurs, il décide de se lancer dans l'aventure des SPAC. Ce véhicule d'investissement, appelé Pegasus, était coté en bourse pour 500 millions d'euros et se voulait le plus gros en Europe. Cependant, deux ans plus tard, l'investisseur préfère mettre fin au projet plutôt que de prendre le risque d'acquérir une entreprise qui ne serait pas rentable.
Découvrez également la cotation du SPAC de Tikehau, Mustier et Arnault à Amsterdam.
Depuis avril 2023, il est sans emploi en raison de difficultés économiques. Bien sûr, il a quelques loisirs, comme courir, chasser et faire des dons à des associations caritatives à Londres, où il vit avec sa famille. C'est ainsi qu'il rejoint le conseil d'administration d'Atos sur invitation de Bertrand Meunier, directeur général à l'époque. Le poste avait effrayé l'ancien Premier ministre Edouard Philippe, qui n'était resté qu'un an avant de décider de partir, choqué par les problèmes internes de l'entreprise informatique. Six mois plus tard, Mustier est nommé à ce poste.
Jean-Pierre Mustier est un individu respecté et apprécié tant par ses collègues que par le marché. Cela s'est traduit par une réaction positive du marché, avec une augmentation de 5,78% du cours de l'action Atos à 5,16 euros à la clôture de lundi (+20% après l'ouverture). Auparavant, le cours avait chuté de 40% depuis le début de l'année.
Lors d'une interview exceptionnelle en 2017, Jean-Pierre-Mustier avait partagé avec le magazine Challenges son expérience de vie et son parcours professionnel atypique. Il avait souligné que la vie professionnelle ne se résume pas à une progression linéaire. Aujourd'hui âgé de 62 ans, son retour en France en tant que président lui permet de retrouver une trajectoire ascendante qu'il avait perdue.
Entreprise: Atos
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